Si PME et ETI ne peuvent pas compter sur la taille et la force des structures des grands groupes pour assurer leur présence à l’international, elles disposent d’autres leviers de développement. Quelles sont leurs recettes pour viser les marchés mondiaux ?
La France, ses exportations et ses entreprises
Avec sa balance commerciale en déficit de 61,2 milliards d’euros et ses 120 699 entreprises exportatrices, la France fait bien pâle figure à côté de son voisin allemand, qui affiche presque 200 000 euros d’excédent commercial et 350 000 entreprises exportatrices. Si les grands groupes restent les premiers exportateurs français (1), les plus petites entreprises sont bien moins présentes à l’international. Les freins sont connus : difficultés financières et organisationnelles, mais aussi manque de connaissances, et simplement réticence à se lancer sur ce terrain inconnu. Pourtant les PME et les ETI françaises offrent aussi de beaux exemples de succès à l’international.
L’innovation comme ingrédient de base
Et le premier ingrédient de la recette pour viser l’international est bien souvent l’innovation. Le dernier baromètre international CCI montre cette corrélation (2) : on peut y lire qu’ « innovation et internationalisation sont des enjeux stratégiques qui s’alimentent mutuellement ». Les entrepreneurs considèrent qu’innover est un atout pour se développer à l’international, et réciproquement. Pour Leosphère, PME leader mondiale de l’exploitation du Lidar, une technologie permettant d’observer les vents et les gaz, avec de nombreuses applications dans l’éolien par exemple, l’innovation est un « instinct de survie », selon les termes d’Alexandre Sauvage, son dirigeant. L’entreprise, en pleine croissance, réalise les 80% de ses 18 millions d’euros de chiffres d’affaires à l’international, et est présente, 10 ans après sa création, sur 3 continents, grâce à son savoir-faire de pointe unique.
Oberthur Fiduciaire, l’un des premiers imprimeurs de billets de banque au monde, est une ETI misant aussi sur une politique active de recherche et développement pour s’imposer sur les marchés internationaux, auprès des Etats donneurs d’ordre. « Sur ces marchés, c’est d’abord l’excellence technique qui permet de l’emporter », résume Thomas Savare, son dirigeant. D’où l’intérêt de la cultiver. Une infographie publiée par Altios International (3) révèle d’ailleurs que les PME exportatrices s’appuient principalement sur deux atouts : le savoir-faire concurrentiel, et l’innovation technologique – les deux étant intimement liés.
Miser sur des niches
En raison de leur taille, qui est d’ailleurs un atout en termes d’agilité et de souplesse, les PME et ETI concentrent généralement leurs efforts sur des marchés de niche, où ils peuvent obtenir et maintenir un avantage concurrentiel. Socomec, constructeur électrique alsacien, cultive son leadership sur des produits très spécialisés, mais qu’il rend uniques au monde : onduleurs ou commutateurs de source par exemple. « Nous sommes des spécialistes. Le moteur, c’est notre savoir-faire technologique au service de produits plutôt haut de gamme et pour des applications ciblées », explique Ivan Steyert, son dirigeant. 70% des ventes de Socomec sont réalisées à l’international, et l’entreprise, qui veut trouver ses relais de croissance à l’étranger (notamment en Asie), mise le milliard d’euros de chiffre d’affaires à horizon 2020.
L’importance de la dimension interculturelle
Mais conquérir les marchés internationaux impose aussi de s’adapter aux coutumes, aux besoins et à la culture des pays visés, parfois au niveau du produit, et toujours au niveau de la relation commerciale. Un art dans lequel certaines PME et ETI excellent. C’est une problématique que connaît très bien Oberthur Fiduciaire, dont le métier consiste aussi à concevoir les billets de banque de ses pays-clients. Or les billets « véhiculent […] de nombreux symboles, ils doivent contribuer au rayonnement des institutions et du pays tout entier », indique Thomas Savare. Ainsi aux savoir-faire en matière d’esthétique et de design – dans lesquels la réputation de la France n’est plus à faire-, il faut ajouter une fine compréhension des besoins du client. La relation avec ce dernier impose donc, comme l’explique le dirigeant d’Oberthur Fiduciaire dans une interview au site Hr.com (4), un vrai « sens diplomatique » : du respect, de l’écoute, de l’humilité… associés à une force de conviction et un enthousiasme certains.
Cette question de l’adaptation aux marchés locaux, si elle prend des formes différentes selon les secteurs d’activité, est en tous les cas toujours au cœur de la stratégie des PME et ETI qui exportent. Aplix, acteur mondial majeur des systèmes auto-agrippants (les scratchs), réalise 95% de son chiffre d’affaires à l’export. Sandrine Pelletier, DG, révèle que dans la mesure du possible, sa stratégie d’internationalisation repose en premier lieu sur une prise de participation majoritaire chez des partenaires locaux, justement pour faciliter « l’acclimatation culturelle ». Robertet, ETI spécialisée dans les matières premières aromatiques naturelles pour les parfums et aliments, apporte pour sa part une attention toute particulière à l’adaptation de ses produits aux marchés et aux goûts locaux. Ce qui passe pour eux par une implantation locale, « l’une des pierres angulaires du développement de Robertet à l’international », rapporte Olivier Maubert. Et ce pour être bien placé pour concevoir des offres au plus près des besoins spécifiques de chacun des 50 pays dans lesquels le groupe est présent.
Viser l’international : des stratégies diverses pour une posture commune
Ces PME et ETI très présentes sur les marchés mondiaux prouvent que ces derniers sont loin d’être réservés aux grosses structures. Si les stratégies divergent (exportations depuis la France, politique d’implantation locale par création de filiale ou rachat d’entreprise, partenariat avec des entreprises sur place), la posture est toujours celle d’une ouverture et d’une volonté d’aller vers ces marchés. Même si cela implique de prendre des risques… mais quel entrepreneur n’y est pas confronté ?
(1) Avec 44% de la valeur des exportations. Source : Etudes et éclairages n°42, septembre 2013 : http://lekiosque.finances.gouv.fr/fichiers/Etudes/tableaux/ee_42.pdf
(2) Les PME-ETI françaises et l’internationalisation, juin 2014 : http://www.cci.fr/c/document_library/get_file?uuid=1d0beb5d-8dbc-4110-a4c1-1baf5724a10c&groupId=10994
(3) http://www.altios-international.com/fr/conseil-international/pme-entreprises-exportatrices
(4) http://www.hr.com/en/app/blog/2012/11/intercultural-business-explained-with-thomas-savar_h91ec49p.html
crédit photo: shutterstock
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